Offrir des salaires compétitifs décents !

Une rémunération équitable pour les enseignant·e·s : une clé pour la réussite future de l'éducation

L'évolution de l'éducation s'accompagne d'une modification du rôle des enseignant·e·s et des autres personnels de l'éducation. Jonglant entre de nouvelles responsabilités et leurs tâches traditionnelles, il·elle·s sont plus sollicité·e·s que jamais. Mais sont-il·elle·s rémunéré·e·s équitablement pour cette charge de travail accrue ? Découvrez pourquoi la garantie de salaires compétitifs pour ces fonctions essentielles est plus qu'une question d'équité - elle est essentielle pour l'avenir de l'éducation.

Dans tous les secteurs de l'éducation, les enseignant·e·s sont confronté·e·s à des difficultés. Il est grand temps de garantir des salaires décents à tou·te·s les enseignant·e·s. Un tel objectif doit être atteint par le biais de négociations collectives, de conventions collectives et en influençant la législation nationale, en prenant également en considération le coût de la vie après la crise du  Covid-19, avec une augmentation de l'inflation, notamment en Europe. Selon Eurostat, l'inflation en Europe a atteint un pic en 2023 mais continue de croître, affectant le revenu des enseignant·e·s qui, avec les mêmes salaires qu'auparavant, ont moins de pouvoir d'achat. 

Le récent rapport de l’OCDE « Regards sur l’éducation 2023 » offre un aperçu significatif de l'éducation dans le monde, en examinant des domaines critiques tels que la réussite, la scolarisation, le financement et l'organisation des systèmes éducatifs dans les différents pays. Le rapport souligne l'urgence de garantir des salaires équitables à tou·te·s les enseignant·e·s et autres personnels de l'éducation, et insiste sur le fait que leurs salaires ne devraient pas être inférieurs à l'équivalent de ceux d'autres professionnel·le·s ayant des qualifications du niveau tertiaire. En moyenne, les enseignant·e·s du premier cycle de l'enseignement secondaire gagnent environ 10 % de moins que les autres personnes titulaires d'un diplôme de l'enseignement supérieur. Les enseignant·e·s diplômé·e·s de l'enseignement supérieur perçoivent généralement entre 81 % et 95 % des salaires de leurs homologues exerçant d'autres professions. En Grèce et en Croatie, l'écart salarial entre les enseignant·e·s et les autres travailleur·euse·s ayant des qualifications similaires dépasse 30 %.

La situation dans l'enseignement supérieur et la recherche (ESR) exacerbe les problèmes de précarité dus aux contrats à court terme. De nombreux·euses enseignant·e·s de ce secteur ne bénéficient pas d'un revenu sûr, étant donné qu’il·elle·s dépendent uniquement du financement de projets et passant d'un contrat à l'autre, ce qui ajoute à leur instabilité financière.

Si les salaires initiaux des enseignant·e·s doivent être augmentés, il est tout aussi crucial d'assurer des voies de promotion et des échelles de salaires structurées pour favoriser la rétention des enseignant·e·s, accroître leur motivation et leur donner des certitudes quant à leur avenir. Offrir des prestations de retraite adéquates est également essentiel pour attirer et retenir les enseignant·e·s dans la profession. Le document politique du CSEE intitulé « Renforcer le statut et l’attrait de la profession enseignante » (2022) souligne l'importance de salaires de départ plus élevés et attrayants, ainsi que d'une meilleure progression des salaires et des carrières, pour attirer et retenir les enseignant·e·s jeunes et débutant·e·s. Le CSEE demande que tou·te·s les enseignant·e·s soient formé·e·s au niveau du diplôme le plus élevé, quel que soit le secteur éducatif dans lequel il·elle·s enseignent, et que leur salaire reconnaisse et reflète les qualifications obtenues afin de renforcer l'attrait de la profession enseignante. Les règles d’un salaire égal pour un travail égal et un travail de valeur égale doivent être respectées dans tous les secteurs.

Dans de nombreux systèmes éducatifs, les salaires des enseignant·e·s augmentent en fonction du niveau d'éducation auquel il·e·s enseignent. Le CSEE insiste sur le fait que l'éducation des enseignant·e·s de la petite enfance devrait bénéficier d'un statut et d'une valeur égaux à ceux des professionnel·le·s des autres secteurs de l'éducation, et que des améliorations sont nécessaires pour les enseignant·e·s du secteur de l'enseignement et de la formation professionnels (EFP), qui font souvent l'objet d'un traitement inférieur en termes de contrats et de salaires. 

Un exemple récent où la négociation collective a eu un impact bénéfique sur les salaires des enseignant·e·s nous vient de Suisse, avec l'action des syndicats de l'éducation VPOD, SER, LCH et d'autres, concernant les salaires des enseignant·e·s de l'éducation de la petite enfance (EPE). En raison de la structure décentralisée, l'éducation de la petite enfance fonctionne séparément de l'enseignement primaire, ce qui entraîne des disparités importantes dans la rémunération des enseignant·e·s, malgré des qualifications et des responsabilités similaires. Les syndicats suisses de l'éducation ont pris des mesures en soulignant que cette question relevait de l'égalité des genres, la plupart des enseignant·e·s de l'éducation de la petite enfance étant des femmes. Par conséquent, à partir de janvier 2023, tou·te·s les enseignant·e·s de l'éducation de la petite enfance en Suisse reçoivent désormais une rémunération égale à celle des enseignant·e·s de l'enseignement primaire, ce qui marque un changement important dans la recherche de salaires équitables dans le secteur de l'éducation.

Toutefois, en ce qui concerne la progression de la carrière, de grandes différences subsistent entre les pays. En effet, les salaires des enseignant·e·s augmentent plus ou moins rapidement au cours de leur carrière selon les pays, avec des différences significatives dans la compétitivité des salaires et le temps nécessaire pour atteindre le sommet de l'échelle salariale. Par exemple, il faut 35 ans aux enseignant·e·s français·es pour atteindre le sommet de l'échelle, ce qui contraste fortement avec le délai de 7 ans observé en Nouvelle-Zélande (OCDE, 2023).

Le CSEE se bat pour augmenter les salaires des enseignant·e·s et s'attaquer à l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes, au sein de chaque secteur de l'éducation ainsi qu'entre les différents niveaux d'éducation et en ce qui concerne les postes de direction. Les disparités entre les genres dans la profession enseignante sont attribuées à des attentes salariales différentes pour les femmes et les hommes par rapport aux perspectives dans d'autres domaines. L'examen plus approfondi des écarts de rémunération résultant d'autres caractéristiques d'inégalité et des différences entre les établissements d'enseignement publics et privés, ainsi que des disparités géographiques, est une demande du CSEE pour lutter efficacement contre la discrimination.

Des salaires équitables et des conditions de travail favorables pour les enseignant·e·s sont essentiels pour garantir une éducation de qualité et inclusive pour tou·te·s et pour remédier à la pénurie croissante d'enseignant·e·s en augmentant l'attrait de la profession.