« La situation des réfugié·e·s reste à ce jour compliquée et nécessite une mobilisation et des actions concrètes », déclare la Fédération des syndicats de l'éducation et des sciences de Moldavie

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Suite à l'invasion militaire de l'Ukraine par la Fédération de Russie, qui a commencé le 24 février 2022, des millions de personnes ont été déplacées, fuyant la zone de guerre vers les pays voisins, dont une majorité de femmes et d'enfants. La plupart des personnes quittent l'Ukraine et traversent la frontière pour chercher refuge dans des pays de l'UE ou d'autres pays voisins, comme par exemple la Pologne, la Roumanie, la Moldavie, la Slovaquie et la Hongrie. De nombreux syndicats de l'enseignement dans ces pays ont déjà exprimé leur solidarité avec le peuple ukrainien et sont intervenus pour soutenir les réfugié·e·s, en particulier les enfants et les jeunes.

Aujourd'hui, nous avons parlé à Ghenadie Donos, président de la Fédération des syndicats de l'éducation et des sciences de Moldavie (ESTU), organisation membre du CSEE en Moldavie, des actions du syndicat pour soutenir les enseignant·e·s ukrainien·ne·s et les réfugié·e·s venant dans son pays.

En raison du conflit militaire en cours en Ukraine, la Slovaquie connaît un afflux sans précédent de réfugié·e·s, dont la plupart sont des femmes et des enfants. Pourriez-vous nous dire quelle est la situation actuelle dans votre pays et quel en est l’impact sur le système éducatif ?

Ghenadie Donos: La situation reste compliquée et nécessite une mobilisation et des actions concrètes dans chaque centre de réfugié·e·s. Je suis d'accord avec nos collègues polonais·e·s qui appellent « invité·e·s » tou·te·s les citoyen·ne·s ukrainien·ne·s  à qui il·elle·s offrent un logement et un repas, car nous estimons que ce mot est plus approprié pour les enfants et les femmes qui souffrent terriblement à cause de la guerre qui se déroule dans ce pays voisin. C'est une chose d'obtenir des médias des informations sur la situation en Ukraine et les problèmes de ceux·celle·s qui cherchent refuge ici, mais c'en est une autre de voir les yeux de ces petits enfants qui ont maintenant besoin non seulement de chaleur, mais aussi d'un mot chaleureux.

Notre Fédération a organisé une série d'actions pour offrir à nos invité·e·s ukrainien·ne·s diverses formes de soutien adaptées à leurs besoins. Ces actions ont été organisées en coopération avec l'administration locale car les besoins des Ukrainien·ne·s ne peuvent être bien compris qu'au niveau local. Nos collègues des différentes régions de la République ont collecté de la nourriture, des médicaments, des produits sanitaires et d'hygiène, des vêtements, voire des jouets pour enfants ; il·elle·s ont offert l'hospitalité à ceux·celles qui restaient ou le transport à ceux·celles qui transitaient vers les pays européens.

D'après ce que j'ai compris après de nombreuses discussions avec des mères ukrainiennes hébergées dans les centres de réfugié·e·s (je fais référence aux centres temporaires ouverts à l'Université d'État de Moldavie, à l'Université technique de Moldavie, à l'Institut des sciences de l'éducation), certains élèves utilisent l'enseignement à distance proposé par les écoles ukrainiennes dans les zones où la guerre le permet. Il est évidemment préférable pour eux d'étudier dans leur langue maternelle et avec les mêmes professeur·e·s et collègues qu'avant la guerre. Nous mettons tout en œuvre pour fournir une connexion Internet de haute qualité, afin que les étudiant·e·s puissent bénéficier de l'enseignement à distance. Cette forme d'étude est surtout utilisée par les étudiant·e·s des classes supérieures, car il·elle·s peuvent obtenir leurs certificats d'études qui leur permettront de passer l'examen final après la guerre. Il y a un autre groupe d'enfants qui veulent s'inscrire dans nos écoles, et surtout, il y a des mères qui aimeraient inscrire leurs enfants dans les jardins d'enfants. C'est là que nous pouvons leur proposer un accompagnement qualifié, en collaboration avec le ministère de l'Education et de la Recherche.

Quelles mesures votre syndicat prend-il pour régler ces problèmes? Que demanderiez-vous à votre gouvernement ?

Ghenadie Donos: Suite à notre appel aux organisations membres affiliées, nous avons collecté jusqu'à présent des dons auprès des membres des syndicats dans les établissements d'enseignement du pays. Le montant viré sur le compte du Conseil Général de l'ESTU est de 475.000 MDL (24. 000 €) au profit des réfugié·e·s.

Parallèlement, des syndicalistes de plusieurs institutions affiliées à l'ESTU s'impliquent très activement dans le processus d'accompagnement des réfugié·e·s. En particulier, l'Université technique de Moldavie (TUM) accueille des réfugié·e·s ukrainien·ne·s depuis le 27 février. Le Centre pour Réfugié·e·s du TUM compte cinq subdivisions, hébergeant quotidiennement 233 personnes, dont 94 enfants. Jusqu'à présent, 778 réfugié·e·s ont été accueilli·e·s et soutenu·e·s au centre pour réfugié·e·s de l'Université technique. Les employé·e·s du Centre mettent tout en œuvre pour leur apporter un soutien affectif et médical et pour leur fournir des produits d'hygiène et trois repas par jour.

Tout ce soutien a été rendu possible, en premier lieu, grâce à l'enthousiasme, la réceptivité et la bonne volonté des employé·e·s et étudiant·e·s du TUM qui se sont porté·e·s volontaires depuis février, mais aussi grâce au soutien de certaines entreprises qui ont apporté un soutien financier. Des collègues du Comité syndical des employé·e·s du TUM et du Comité syndical des étudiant·e·s du TUM ont été activement impliqué·e·s. La Fédération syndicale de l'éducation et des sciences de Moldavie a transféré 40 000 MDL pour fournir de la nourriture aux réfugié·e·s séjournant dans les foyers du TUM.

Des collègues de l'Université d'État de Moldavie (USM) soutiennent également les réfugié·e·s ukrainien·ne·s hébergé·e·s dans ses foyers. L'institution a fourni aux réfugié·e·s un logement dans trois endroits, et jusqu'à présent, l'Université d'État de Moldavie a accueilli plus de 2 500 réfugié·e·s. Le Comité du syndicat des étudiant·e·s, en collaboration avec l'Eglise « L'Accueil du Seigneur », est responsable de la collecte des dons et de leur distribution aux centres de réfugié·e·s de l'USM, ainsi que de l'alimentation et du bien-être des 200 enfants hébergés dans les centres de l'USM. Là encore, la Fédération syndicale de l'éducation et des sciences a versé 40 000 MDL pour l'achat de vivres et d'autres produits de première nécessité.

Le Comité syndical de l'Institut des sciences de l'éducation s'implique très activement pour fournir aux réfugié·e·s hébergé·e·s dans les locaux de l'institution toutes les fournitures nécessaires. Actuellement, 156 personnes, dont 48 enfants, vivent ici. La Fédération syndicale de l'éducation et des sciences a transféré 20 000 MDL sur le compte de l'institution pour soutenir les Ukrainien·ne·s déplacé·e·s à cause de la guerre.

Un grand nombre de réfugié·e·s se trouvent dans le centre pour réfugié·e·s ouvert dans le sanatorium « Bucuria-Sind » à Vadul lui Voda, qui accueille actuellement des familles de réfugié·e·s d'Ukraine. Depuis le début de l'agression militaire russe contre l'Ukraine, environ 800 réfugié·e·s, dont 250 enfants, ont été placé·e·s dans cette institution dirigée par la Confédération nationale des syndicats de Moldavie (CNSM). Actuellement, il y a 130 réfugié·e·s au sanatorium « Bucuria-Sind », dont 30 enfants. La Fédération syndicale de l'éducation et des sciences de Moldavie a transféré 100 000 MDL dans les premiers jours pour assurer l'approvisionnement en chauffage du centre pour réfugié·e·s. Récemment, nous avons transféré 150 000 MDL supplémentaires pour payer les factures des services du centre de réfugié·e·s de Vadul lui Voda.

Quant à nos relations avec le Gouvernement, en particulier le ministère de l'Education et des Sciences, elles sont basées sur le partenariat et le dialogue social. Bien sûr, la crise des réfugié·e·s a laissé sa marque sur notre agenda commun, mais nos efforts sont orientés vers la garantie de la fonctionnalité du système éducatif national et vers la poursuite permanente du dialogue.

Comment le CSEE et les syndicats de l'enseignement d'autres pays pourraient-ils aider votre syndicat à relever ces défis ?

Ghenadie Donos:  Les encouragements et l'intérêt du CSEE pour nos actions sont pour nous un signe d'appréciation. Bien sûr, les problèmes qui se sont posés pour assurer le bon fonctionnement des centres de réfugié·e·s nous pèsent, non seulement parce que la tragédie s'est produite si soudainement, mais surtout parce que nos moyens financiers pour faire face à la crise des réfugié·e·s sont insuffisants. C'est pourquoi toute aide de partenaires est la bienvenue. Par exemple, j'ai reçu un message du directeur du sanatorium « Bucuria Sind » indiquant que la facture pour l’énergie utilisée pour le chauffage doit être payée, ce qui équivaut à 300 000 MDL (l’équivalent d'environ 15 000 € mensuels). Pour le moment, nous ne pouvons payer que la moitié de ce coût et nous devrons trouver une solution pour couvrir la totalité du montant. Et ce n'est qu'un exemple des problèmes auxquels nous sommes confronté·e·s.

Les réfugié·e·s ne nous imposent pas de conditions, et nous ne pouvons imposer de conditions à personne, nous pouvons simplement informer sur les mesures que nous prenons et sur nos besoins.