« L’éducation et l’accueil de la petite enfance sont désormais véritablement inscrits au programme politique »

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Stig Lund (Danemark) représente le CSEE au sein du groupe de travail de la Commission européenne en charge de l’éducation et de l’accueil de la petite enfance, mandaté pour la période 2018-2020. Le CSEE a rencontré Stig Lund pour connaître son point de vue à propos du changement de perspective de l’UE concernant ce niveau essentiel du système éducatif et à propos du rôle du CSEE, représentant le personnel de l’éducation de la petite enfance.

Stig Lund (Danemark) représente le CSEE au sein du groupe de travail de la Commission européenne en charge de l’éducation et de l’accueil de la petite enfance, mandaté pour la période 2018-2020. Le CSEE a rencontré Stig Lund pour connaître son point de vue à propos du changement de perspective de l’UE concernant ce niveau essentiel du système éducatif et à propos du rôle du CSEE, représentant le personnel de l’éducation de la petite enfance.

Stig G Lund

CSEE: Quels sont, selon vous, les problèmes que rencontre le secteur de l’éducation de la petite enfance ?

Stig Lund: Dans le secteur de la petite enfance, nous travaillons en adoptant une approche holistique très large du développement, de l’apprentissage et du bien-être de l’enfant.

En Europe, les systèmes d’éducation et d’accueil des jeunes enfants varient fortement d’un pays à l’autre. Le problème majeur dans bon nombre de pays européens est que les effectifs travaillant dans les établissements d’éducation et d’accueil de la petite enfance ne sont, hélas, ni enseignant·e·s ni éducateur·rice·s. Si un nombre très limité de postes sont quelques fois confiés à des enseignant·e·s, la majorité d’entre eux sont occupés par des assistant·e·s peu ou pas qualifié·e·s pour exercer ce type d’emploi. Cette situation a une incidence considérable sur les enfants. Les études montrent que les premières années de la vie sont incroyablement importantes. En l’absence de cette composante fondamentale de leur éducation, les enfants seront livrés à eux-mêmes plus tard.

CSEE : Quels sont les changements revendiqués par le CSEE et ses organisations membres ?

Stig Lund: L’important est de relever le statut et le prestige de cette profession, afin de pouvoir améliorer les salaires et les conditions de travail du personnel de l’éducation. Cette condition est essentielle pour pouvoir attirer des éducateur·rice·s et des enseignant·e·s plus talentueux·euses au sein de la profession.

Nous devons également reconnaître que, aujourd’hui dans ce secteur, un grand nombre de postes sont occupés par du personnel non qualifié. Nous partageons donc un objectif commun : renforcer les compétences de l’ensemble du personnel de ce secteur. Les enseignant·e·s doivent pouvoir accéder plus facilement au développement professionnel continu, tandis que les assistant·e·s doivent se voir offrir une formation complète d’enseignant·e·s débouchant sur une qualification.

Les syndicats de l’enseignement s’inquiètent de l’avenir des enfants. Nous ne nous battons pas uniquement pour notre profession, nous luttons aussi pour leurs droits. Nous souhaitons voir nos enfants devenir des citoyen·ne·s courageux·euses et indépendant·e·s, qui luttent pour leurs droits. A cette fin, l’aide des éducateur·rice·s leur est indispensable. Nous exerçons une profession dont nous sommes fier·ère·s et nous disposons d’une Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (1990)), un outil qui nous est essentiel pour défendre la qualité de l’éducation et de l’accueil de la petite enfance.

CSEE : Quelle approche l’Union européenne adopte-t-elle, selon vous, dans ses politiques pour l’éducation de la petite enfance ?

Stig Lund: Auparavant, l’UE considérait l’éducation de la petite enfance comme un service essentiellement proposé aux parents qui travaillent, pour lequel ils paient afin de pouvoir aller travailler. Cette façon de voir les choses nous préoccupait dans la mesure où ce secteur de l’éducation était transformé en une marchandise offrant la possibilité aux entreprises privées de réaliser des bénéfices.

Aujourd’hui, l’UE semble avoir revu son approche et s’emploie à renforcer les normes de ce niveau du système éducatif. Le Conseil Education, composé des ministres de l’Education des Etats membres de l’UE, a adopté une nouvelle Recommandation relative à des systèmes de qualité pour l’éducation et l’accueil de la petite enfance, à laquelle a contribué le CSEE en tant que membre d’un premier groupe de travail de la Commission européenne pour l’éducation et l’accueil de la petite enfance, chargé d’examiner une série de propositions visant à améliorer ce secteur. La position officielle de l’UE exposée dans les recommandations du Conseil est la suivante : garantir la haute qualité de l’éducation de la petite enfance est un bon investissement, qui nécessite des enseignant·e·s qualifié·e·s, de meilleurs salaires et de bonnes conditions de travail dans ce secteur.

CSEE : En quoi consiste le groupe de travail actuel de l’UE pour l’éducation de la petite enfance ?

Stig Lund: La Commission européenne a créé le groupe de travail actuel « Education et accueil de la petite enfance » pour la période 2018-2020 dans le cadre du programme Education et Formation 2020. Il s’articule autour de deux objectifs précis : le premier consiste à formuler des idées et des propositions pour l’élaboration des politiques des Etats membres, afin que tous les enfants puissent avoir accès à l’éducation de la petite enfance ; le second concerne la professionnalisation du personnel.

La plupart des membres du groupe de travail représentent les ministères des Etats membres de l’UE. Au terme du mandat du groupe de travail en 2020, nous envisageons de présenter à la Commission européenne un document contenant des propositions, qui devront être examinées ensuite par le Conseil Education. Il s’agira de politiques concrètes basées sur des recherches, qui devront être prises en considération par les pays. Mais nous devrons toutefois respecter le principe selon lequel il appartient aux gouvernements nationaux de prendre les décisions concernant les moyens d’améliorer leurs systèmes éducatifs, les traités de l’UE stipulant que l’éducation demeure une compétence nationale.

CSEE : Que doivent savoir les syndicats de l’enseignement à propos du travail du CSEE dans le domaine de l’éducation de la petite enfance ?

Stig Lund: Tout d’abord, nous devons nous rappeler que nous fonctionnons dans un contexte européen. Or nous restons toujours centrés sur notre situation locale et nos problèmes locaux. S’intéresser à la situation dans d’autres pays nous apparaît parfois difficile. Lorsque les syndicats se rencontrent au niveau européen, à l’occasion des événements organisés pour nous par le CSEE, nous constatons que nous sommes toujours face aux mêmes problèmes. Mais lorsque nous retournons dans notre pays, nous oublions parfois les discussions que nous avons eues et sommes à nouveau plongés dans nos débats nationaux. Il est donc très important de se rappeler que nous devons amener ces discussions dans notre pays, utiliser ces informations pour réfléchir à notre propre situation et examiner sous un angle critique notre propre profession, nos propres pratiques et notre propre façon d’agir en tant que syndicat, en nous inspirant de ce qui a été dit par nos collègues des autres pays. Nous avons tant de choses à nous apprendre mutuellement à travers l’Europe !